Qu'est-ce qu'un élevage intensif?

 

Un élevage intensif est un type d'exploitation dans lequel on cherche à avoir les meilleurs rendements possibles, tout en dépensant le moins d'argent possible. Ce type d'élevage est particulièrement développé aux Etats-Unis, au Brésil et en Inde (malgré la dimension religieuse et sacrée de la vache). L'élevage intensif est apparu après la Seconde Guerre Mondiale, pour répondre aux besoins immédiats de la population en nourriture. Depuis, il s'est largement développé, et a pris le dessus sur l'élevage extensif,  jusqu'alors principal type d'exploitation. Cet élevage a provoqué la mort de nombreux petits élevages.

 

Dans un élevage intensif, l'herbe seule ne suffit pas pour produire du lait : on a recours à du maïs ensilage (pauvre en vitamines et en protéines), des concentrés alimentaires, mais aussi du sel, de la coque de soja (un OGM) et de l'azote, qui augmentent la productivité de la vache. Naturellement, la vache ne consomme pas de céréales, donc pour habituer son estomac, on lui donne au départ un mélange d'herbe et de maïs. La quantité de maïs est petit à petit augmentée jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'herbe. La plupart des aliments consommés dans ces exploitations viennent du Brésil ou des Etats-Unis, qui ont fortement déboisé afin de laisser place à une agriculture intensive destinée principalement à la culture des céréales comme le maïs.

Le lait produit par la vache d'un élevage intensif sera moins riche en oméga-3 et en vitamine à cause de son alimentation, qui est artificielle, ce qui provoque des différences de qualité, de goût et de texture. Cependant, les principales industries de lait achètent les différents laits, provenant de différentes fermes, et donc de différents types d'élevage, et les mélangent tous ensemble avant de les commercialiser. Cela a tendance à décourager les petits éleveurs, car la qualité du produit n'est pas mise en valeur.

 

Les bêtes choisies dans les élevages intensifs doivent répondre à certains critères : la production laitière, la santé, la facilité du vêlage, la fécondité... Auparavant, les critères portaient seulement sur la productivité, qu'on voulait très élevée, mais au fur et à mesure, les vaches étaient de moins en moins en bonne santé, et ne pouvaient plus être fécondées, même en bas âge. 

 

Les feedlots, berceaux de l'élevage intensif

 

Les feedlots, ou parcs d'engraissement, sont l'exemple-type de l'élevage intensif. Dans ces espaces clos pouvant recouvrir jusqu'à 80 hectares, les vaches sont concentrées dans des fermes ou des enclos, dont elles ne sortiront que pour être envoyées à l'abattoir. Les feedlots sont principalement développés aux Etats-Unis: on estime que moins d'1/4 des vaches américaines ont accès aux prairies. Alors qu'en France on consomme environ 18,2 kg de bœuf/pers/an, au Texas ce sont environ 40 kg de bœuf/pers/an consommés, soit près de 4 fois plus que la moyenne mondiale. On compte 75 000 bêtes dans les feedlots du Texas, avec, chaque semaine, une arrivée de 2 500 nouveaux bovins. Ils y restent pendant 6 mois et suivent un régime alimentaire intensif visant à leur engraissement. Et ça marche ! Pour les mêmes bêtes, on a besoin d'un camion pour les transporter à l'arrivée, et de deux au départ. Ces usines à viande produisent jusqu'à 7 000 tonnes de steak par semaine. Pour ce faire, les vaches sont vaccinées contre les parasites à leur arrivée, et reçoivent des injections à base d'hormones de croissance pour se développer plus vite. Le régime alimentaire comprend également la consommation de corn flakes: afin d'augmenter de 10 à 12% la prise de poids, on transforme du maïs en corn flakes, et, durant toute la durée de son séjour dans le feedlot, la vache recevra chaque jour 1 kg de corn flakes en plus. Grâce à ce système, les veaux sont prêts à l'abattoir en 18 mois au lieu de 3 ans.

 

 

Central Valley, en Californie, est le berceau de l'agriculture intensive aux Etats-Unis. Là-bas, les exploitations regroupent des centaines de millions de vaches. La Californie est le premier producteur de lait du pays, avec près de 19 millions de tonnes de litres/an. Dans certaines exploitations, on atteint un nombre de bêtes supérieur à 9 000 vaches laitières en production sous des hangars. Ces fermes deviennent de véritables usines à lait : la traite des vaches se passe dans des manèges pouvant accueillir et traiter 80 vaches en 10 min. Les vaches passent à la traite 3 fois par jour, contre 2 fois dans des élevages extensifs: cela permet de soulager les mamelles, et donc d'augmenter de 10% la production de lait/vache. Grâce à ce type d'élevage, les vaches américaines produisent 4 fois plus de lait qu'il y a 100 ans (les meilleures vaches pouvant produire jusqu'à 70 L de lait/jour).

 

Et en France?

 

En moyenne, une ferme américaine compte deux fois plus de vaches qu'une ferme française. En France, l'exemple connu d'élevage intensif est le projet de la ferme des 1000 vaches dans la Somme. Vivement critiqué, ce projet a finalement vu le jour en 2014 : 1 000 vaches qui ne sortiront jamais de leur ferme, ayant en tout et pour tout 7 m² sur du béton, produisant 8 millions de litres de lait/an, et nourries exclusivement avec des aliments concentrés. Les déjections sont ramassées et recyclées grâce à un méthaniseur, pour produire de l'électricité. 

Mise à part cette grosse ferme, on compte assez peu d'élevage avec un degré d'intensification aussi élevé en France. De plus, les hormones de croissance sont interdites, donc le cycle d'engraissement de la vache n'est pas aussi rapide qu'aux USA. Toutefois, le prix de la viande a baissé de 30% en 30 ans : en effet, les viandes à bas prix des supermarchés sont les viandes des vaches laitières âgées envoyées à l'abattoir, donc qui coûtent assez peu. 

 

Durabilité d'une exploitation intensive

 

Comme dans l'élevage intensif le chargement (UGB/hectare) est très élevé, ce type d'élevage est plutôt favorable à une certaine durabilité économique : dans un espace réduit, on a un nombre de tête optimisé, donc l'éleveur dépense moins d'argent en entretien de la surface, et peut développer les espaces libres. Cependant, comme les élevages intensifs se concentrent sur une seule espèce animale (les lieux sont organisés et structurés autour de cette espèce), lors des épidémies (comme la crise de la vache folle), l'éleveur ne peut compenser ses pertes par une autre espèce. De plus, les animaux étant tous les uns à côté des autres, les virus et maladies se répandent beaucoup plus vite. L'économie d'un élevage intensif est donc très forte mais peu stable, car une seule bactérie peut détruire l'exploitation entière. 

 

Sur le plan environnemental, les exploitations intensives sont peu durables. Bien qu'un fort chargement permette de libérer des espaces pour maintenir la biodiversité, la diversité génétique de l'espèce bovine diminue, suite à une insémination artificielle très contrôlée: les races à hauts rendements sont sélectionnées. D'autres facteurs viennent aggraver les considérations environnementales dues à ce type d'élevage:

  • Les bovins produisent énormément de déjections (30 millions de tonnes/an pour 1 600 feedlots aux USA). Ces déjections polluent beaucoup les sols : en effet, on retrouve tous les engrais chimiques comme le nitrate, les antibiotiques, les hormones de croissance et autres dans les sols où sont accumulées leurs déjections. De plus, il y a une pollution liée aux pesticides utilisés pour produire l'alimentation de la vache. Tous ces engrais chimiques infiltrent les sols, et polluent les nappes phréatiques. L'eau contaminée est ensuite acheminée vers nos robinets, et nous buvons cette eau polluée.

  • La diminution de l’autonomie des exploitations implique un besoin pour l’éleveur d’acheter la nourriture consommée par ses animaux. Le transport de cette nourriture a pour conséquence d'augmenter le bilan carbone.
  • D'après un rapport de la FAO, l'élevage intensif de bovins produirait 18% des émissions de GES, utiliserait 26% des terres émergées du globe pour les pâturages et 8% des ressources d'eau de la planète. Il serait comme dit ci-dessus un des facteurs les plus importants de pollution des eaux. Il neutralise également 33% des terres arables (terres pouvant être cultivées) à lui seul, et est responsable de 37% des émissions mondiales de méthane liées aux activités humaines. Il est également la principale cause de la déforestation, notamment en Amazonie, à cause des terrains d'élevage et des terres cultivant la nourriture nécessaire à l'élevage, et est responsable de l'érosion des sols à beaucoup d'endroits du globe.

Sur le plan social, l'élevage intensif présente des avantages pour les Hommes, tels que la baisse des prix des produits d'origine animale. Beaucoup plus de personnes ont donc accès à ces produits, et les famines pourraient potentiellement être diminuées, car plus de personnes auraient accès à des apports en protéines. Cependant les ressources sont mal réparties, et l'accès à celles-ci est difficile dans certains endroits du globe. Ce type d'élevage n'est donc pas la solution contre les famines. Cependant, la qualité de la viande est inversement proportionnelle à la quantité produite. Pour avoir une viande de qualité optimale, il faut que la vache soit en extérieur et consomme l'herbe des pâturages. Les viandes peu chères sont donc moins bonnes et moins intéressantes nutritivement. La forte mécanisation des élevages intensifs est très désavantageuse pour les Hommes. En effet, elle entraîne une diminution du besoin en main d'oeuvre, et donc une baisse du nombre d'emplois dans le secteur agricole. De plus, elle favorise le travail à la chaîne, qui peut entraîner des séquelles mentales sur les employés. Les élevages plus modestes disparaissent. Les zones rurales sont alors délaissées et l’exode rural est renforcé.

 

D'un point de vue éthique, l'élevage intensif ne respecte pas le bien être de l'animal. Ses conditions de vie sont désastreuses, et certaines vaches sont tellement gavées d'hormones pour assurer leur cycle de reproduction qu'elles ne peuvent même pas tenir debout !

 

L'élevage intensif paraît stable économiquement, mais un coup de vent et tout s'effondre ! Il ne respecte pas l'environnement et les valeurs sociales et éthiques.